Bérarde-Bérarde par le Pelvoux (5j)

Massif : Ecrins
Départ : la Bérarde (1720 m)

Topos associés : Dôme des Ecrins, par le Col des Ecrins Roche Faurio, Par le glacier Blanc Mont Pelvoux, Traversée Pas des Aupillous / Col du Sellar, versant Est Col de Says en traversée Est-Ouest Col du Riou Blanc en traversée des Bans au Pelvoux Brèche des Barres, Facette NE  Pointe Louise, face sud

Sommets associés : Roche Faurio (3730 m) Pas des Aupillous (3103 m) Mont Gioberney (3352 m) Mont Pelvoux (3943 m) Brêche des Ecrins (3661 m) Col du Riou Blanc (3303 m) Pointe Louise (3668 m)

Orientation : T

Dénivelé : 9000 m.
Ski : 5.2

Faune : cet itinéraire passe près de zones sensibles. Voir consignes sur fiches topo

Le week-end de 5 jours arrive bien trop vite pour que nous soyons organisés a temps. Emeric a proposé un tour qu'on revoit l'avant veille pour un itinéraire moins engagé. Je mets de côté mes principes de refuge gardé et accepte a demi-mot le chargement car en mai beaucoup de refuges ferment. On contacte les copains pour savoir si quelqu'un nous accompagne. Léo nous accompagnera finalement sur le séjour. Dernier préparatif, appeler les refuges. Les Bans sont gardés, ce qui nous limite à deux jours en autonomie et deux jours en refuge gardé, bonne nouvelle, ça laisse la place pour caser la marmotte dans le sac

J1 : Bérarde - Pigeonnier par le Col de Says

Itinéraire : la Bérarde - Col de Says - Refuge du Pigeonnier 

Horaires : 5h - 13h30

14km / 1500m D+ / 760m D-

Départ de la Bérarde après une courte nuit au refuge d'hiver. Il a neigé jusqu'au hameau, départ en baskets qui prennent rapidement l'humidité. On remonte le vallon du Carrelet dans la nuit, parfois on brasse dans une bonne épaisseur de neige, car la sous-couche n'est pas continue. Beaucoup d'arbres encombrent le chemin compliquant notre progression. Au refuge du Carrelet aucune trace, nous voilà bien seuls. On poursuit en direction de la Pilatte pour bifurquer un peu avant dans le vallon du Says. Les nuages se dissipent peu à peu, laissant place à une chaleur cuisante. L'itinéraire est évident, c'est tout droit. Jamais très raide, mais assez pour qu'on n'ait pas envie d'y traîner. 10h15 on a passé la partie la plus raide. On atteint le Col du Says à 11h, conformément à l'horaire fixé. Pas le temps pour le Gioberney par contre, le sommet sera pour une autre fois. On bascule en W dans les belles pentes sous le col, Emeric s'y engage prudemment car le haut de la face est bien chargé. Passés les 2 premiers virages on trouve une poudre dense plus homogène et on peu se lâcher plus sereinement. On sort de la face par un court couloir puis partons pour une traversée vers la droite pour rejoindre le refuge du Pigeonnier. Clairement la traversée sous les barres en Sud n'envoie pas du rêve. Le début passe plutôt bien, malgré une neige un peu lourde. On traverse plus loin de belles coulées, avec des plaques plutôt épaisses. Puis vient le moment de se faire happer par un brouillard dense sous le vrombissement des purges. Ambiance plus que douteuse, on n'a aucune idée d'où ça part on ne peut qu'espérer que ça ne nous tombe pas dessus. On poursuit dans une neige pourrie en profondeur. Alors qu'on s'attend à voir le refuge on se retrouve devant un talweg bien pentu entre deux barres rocheuses. Léo part à la trace du machin, on le regarde faire purger la pente à gros fracas. Le plan m'inspire pas du tout j'envisage de remonter la coulée à pied pour me rendre compte qu'on s'enfonce jusqu'au sol. Je rechausse vite les skis range le cerveau dans le sac et m'engage dans la tranchée de Léo. De l'autre côté on ne voit toujours pas le refuge. Il est où bordel ce foutu refuge? On passe à pieds pour contourner un caillou, derrière c'est moins expo et la neige est un peu moins pourrie. On se sent un peu plus en sécurité bien que les purges s'activent toujours. Encore un bout de traversée puis on passe au dessus d'un nouveau cailloux pour enfin se retrouver nez à nez avec le refuge. Soulagés on va vite s'y réchauffer autour d'un feu, d'un café et faire sécher nos affaires trempées par cette soupe. A tête reposée on revient sur les péripéties de la journée. On se rend compte qu'on a tous trois songé à descendre au Gioberney d'où on aurait pu dormir à Xavier Blanc pour éviter cette traversée douteuse, mais aucun n'a suggéré l'idée tellement on avait en tête de devoir aller au Pigeonnier. Une erreur qui nous aura fait passer un sale moment, heureusement sans gravité. 

J2 : Pigeonnier - Bans par le Pas des Aupillous

Itinéraire : Refuge du Pigeonnier - Pas des Aupillous - Refuge des Bans

Horaires : 3h - 11h30

15,5km / 1600m D+ / 1920m D-

Après notre frayeur nivo de la veille, pas question d'aller s'exposer aux purges sous le pas des Aupillous. On part donc aux aurores, réveil 2h15. Autant dire que nos compagnons du refuge auront choisi le second dortoir. 

Départ sous un ciel étoilé nous laissant espérer un bon regel. La descente vers le Gioberney sera toutefois sans appel, les trois premier virages sont prometteurs, puis c'est croûte de plus en plus cassante jusqu'à une neige bien pourrie. Pas mécontente quand on passe enfin à pieds. Skier de la lourdasse à 3h30 tout de même. On va miser sur la fin de nuit pour le regel. 

On chausse les baskets pour descendre au Gioberney et emprunter le sentier du ministre. Entre 2 phases de somnolence la passerelle réduite à une simple planche en place de 15cm de large nous éveille. Finalement on est presque heureux qu'il n'y ait pas de regel. On bifurque pour les Aupillous. Le chemin est efficace et on chausse vers 1900m alors que le jour est bien levé. Le bas est en neige tassée, puis c'est épisode croûte cassante. Ensuite croûte vitrifiée, puis on atteint le replat. Fin de l'itinéraire assez évident, dans une neige facile à remonter, un peu plaquée sur 5cm. On passe le pas des Aupillous au point 3180m, descente correcte à lourde mais qui reste skiante jusqu'au refuge. Le gardien est étonné de nous voir débarquer aussi tôt. Ben oui mais le regel est pourri et la descente était Est... Aprèm, omelette, glandouille, topotage, sieste, apéro, en regardant purger les couloirs. Gardien bien sympa, n'hésitez pas à aller rendre visite à Lucas il est très accueillant! A noter le four solaire hyper efficace pour faire fondre la neige.

J3 : Bans - Ecrins par le Col de Riou Blanc

Itinéraire : Refuge des Bans - Col de Riou Blanc - Glacier des Bœufs Rouges - Refuge du Pelvoux 

Horaires : 6h - 16h 

12,6km / 2000m D+ / 1330m D-

Après une presque grasse mat' on part à 6h pour viser le col du Riou Blanc à 10h. On a repéré qu'il fallait être vigilants sur l'itinéraire car il faut pas mal traverser pour rejoindre le col et la combe présente pas mal de bombés et petites barres. Comme on a eu la flemme d'aller repérer le départ du chemin la veille pour passer une première petite barre, on débute par quelques minutes d'errance autour du refuge. Malin! la suite déroule assez bien, l'itinéraire est finalement assez évident et surtout la combe est sublime et très sauvage. Enfin un bon regel qui nous permet d'être assez efficace, jusqu'à la traversée vers 2900m. Une coulée en neige dure agrémente la traversée, pas le truc que j'affectionne... après coup ça aurait été plus efficace de la contourner par le bas. On atteint la pente finale (environ 300m), bien à l'ombre contre la barre ça change d'ambiance, le froid nous saisit d'un coup. La neige est rapidement traffolée, on se range tranquillement derrière Léo qui nous trace volontiers tout ça. Les derniers mètres se font à pieds dans un gros brassage et sortent sur une petite fenêtre pile en face des 3900m des Ecrins. Magnifique! L'horaire étant largement dépassé, on se concentre sur la suite de l'itinéraire qui n'est pas franchement trivial, descente à vue du Glacier des Boeufs Rouges. Enfin à vue, sauf qu'on voit pas bien la sortie comme il y a un gros bombé sur le haut de la face. Léo va voir, on le rejoint, Emeric poursuit, on est assez alerte quand il s'engage sur le bombé chargé mais rien ne bouge. L'avantage du bombé c'est qu'il est poudre, sur le côté c'est moins chargé mais en boulettes. Plus bas c'est croûté en surface, skiant mais avec la pente et le verrou au-dessus ça me demandera pas mal de concentration. Léo passe le ressaut assez serein, quasi pas de glace. Je passe un peu plus tendue, au moins c'est pas expo. La suite est moins raide mais bien béton, le final encore moins raide mais dans les boules. Passé les boules, c'est presque trop mou, mais on peu souffler un peu. 

Reste la traversée des barres de l'Ourro, Léo connait, faut pas traîner qu'il dit ça purge sous ces barres est. Encore un immense champ de boules et de ravines, avec le leitmotiv ne pas trainer dans ce chantier. Pas de tout repos l'affaire. Quelques virages tranquillou sympa en bas dans une neige tassée et on rejoint le fond du vallon. On laisse Léo descendre à Pelvoux, vaquer à ses occupations. Petite pause au bord du chemin avant de monter au refuge. On en profite pour discuter un peu sur la suite du programme, les Violettes m'impressionnent un peu après l'engagement de la traversée du jour. Ceci dit la traversée du Pelvoux ne semble pas si technique et j'ai bien étudié la carte et le topo. On décide donc de maintenir le programme. La montée au refuge se fait en grande partie à skis, on y arrive vers 16h et on saute sur le dernier matelas restant. On sera finalement 13 au refuge pour 10 personnes, dans une ambiance bien sympathique. Fin d'aprem au soleil en terrasse à surveiller le toit remplir les casseroles d'eau. 

J4 : Refuge du Pelvoux - Refuge des Ecrins par le Pelvoux

Itinéraire : Refuge du Pelvoux - Mont Pelvoux par le Couloir Coolidge - Descente par le Glacier des Violettes - Pré de Madame Carle - Refuge des Ecrins

Horaires : Départ 4h - Mont Pelvoux 8h30 - Pré de Madame Carle 10h30 - Refuge des Ecrins 16h30

18,3km / 2600m D+ / 2100m D-

La longue étape de ce périple est aujourd'hui. Clairement l'idée est de réaliser proprement la traversée du Pelvoux en gérant l'horaire, de prendre une bonne pause au Pré puis de remonter lentement mais surement au refuge des Ecrins. Enfin pas trop lentement quand même histoire de profiter d'une bonne bière au refuge gardé! 

Départ 4h, certains partent à 3h30, d'autres vers 4h15, globalement les 13 frontales (ah non plus que 12, il parait qu'il y en a une qui s'est malencontreusement échappée de son propriétaire), se suivent de près. A la première conversion en sortant du refuge on se dit qu'une paire de couteaux ne sera pas superflue. Ensuite ça déroule facile, on voit pas bien où on en est dans la nuit c'est étoilé mais la lune ne daigne pas nous éclairer. L'ambiance est belle. 

Une première coulée en neige dure à traverser, je sais pas trop s'il y a du vide en dessous, mais c'est pas méga confort comme situation. Bon personne n'a déboulé devant je devrais m'en tirer. Nouveau champ de boules à monter pour atteindre la bosse de Sialouze, peu à peu, tout le monde passe à pied. Sur la bosse on contemple le lever du jour au pied du Pelvoux. Incroyable! 

On reste à pieds pour éviter les manip sachant le couloir Coolidge qui nous guète. Ca porte bien, puis brasse sur le haut, on profite allègrement des traces de nos prédécesseurs, merci à vous si vous passez par là! C'est qu'il faut monter à 3950m quand même dans l'histoire! Je retrouve Emeric à la sortie du couloir, dans les starting blocs skis au pieds, euh attends 2 min je sors une pâte de fruits, je prends 2-3-4 photos parce que c'est whaoou superbe, et c'est bon je suis taquet. Oups, mais les jambes tirent au fait! Le sommet n'est plus très loin, lentement mais sûrement on y arrive. On croise le guide Alain et son client cueilleur de Violettes qui commencent à descendre, et à 8h30 pétante on retrouve les 4 autres joyeux lurons de devant au sommet. 15min de pause parce qu'à quasi 4000m il me faut 5 tentatives pour me rappeler que je voulais mettre de la crème solaire. Et plus qu'à se lancer dans la descente. 

Le glacier est plutôt plat, poudre croûtée puis poudre dense, puis peu à peu transfo. Le glacier est bien comblé ça passe au centre, pas besoin de contourner par la bosse d'été. Les séracs sont comme décrits dans le topo et les CR : impressionnants! Dans cet environnement les 1000 premiers mètres de descente sont avalés en 15min. Un tout droit dans la glace au-dessus d'une crevasse, pas de soucis, je vais pas rester prendre l'apéro sous le gros glaçon qui me dévisage! Bref, en fait ça passe super bien. Sortis du passage expo on s'octroie une courte pause, c'est que les cuisses fument un peu après ça et il fait chaud. On poursuit dans une neige peu à peu plus lourde mais ça reste pas pire. Quasi pas de coulées à traverser. On finit la descente avec les 4 skieurs du sommet c'est convivial. Petit déchaussage pour la remontée de la vire, puis on est déjà au Pré. Ah non, il reste le ravin des militaires, je l'avais oublié celui-là. En boulettes bien molles qui commencent à tasser ça passe bien. 

10h15 au Pré de Madame Carle on retrouve Léo pour la suite du parcours. Un peu de plat et on se pose un bon moment en terrasse au refuge du Pré à élaborer le programme du lendemain. 

On avait prévu de passer par le Col de Roche Faurio pour rentrer à la Bérarde, ou peut-être par Émile Pic, finalement on préfère assurer de bonnes conditions de neige en altitude en tricotant au-dessus du Glacier Blanc puis retour par le Col des Écrins. 

Après cet entracte nous prenons la route pour le refuge des Écrins. L'itinéraire est enneigé quasi en continu. Sous le replat du glacier blanc on s'offre un petit passage de grimpe dans les barres, le chemin c'était trop monotone. Repeautage, on passe le refuge du glacier blanc, c'était l'idée initiale pour la nuitée, mais pas de repas du soir proposé ce jour. Il reste plus grand chose, ah si, beaucoup de plat. L'occasion d'observer vers le Pelvoux, puis le Dôme et la barre. Ça a beau être parcouru comme endroit, c'est beau! Enfin le refuge apparaît, les pieds brûlent mais tant pis. On pense à la beauté des lieux, au refuge qui se rapproche, à la bière qui n'est plus très loin et je fais équipe mentalement avec Emeric qui doit se trouver à peu près dans le même état physique. Le refuge est atteint à la fin de la journée et qu'elle journée ! Beaucoup de monde au refuge, je me faufile pour trouver une paire de crocs, m'aperçois qu'une rondelle a disparu de la coque de ma chaussure. Zut, pas cool ça. Soirée bière, rafistolage de chaussure, la caisse à outils du gardien y passera. La gardien est chouette il me file même du scotch pour rafistoler ma doudoune qui perd des plumes. Paraît que maintenant on reconnaît Em42 et Glad38 à la fameuse doudoune violette qui perd des plumes. La prochaine sera argentée, on verra moins le chatterton. 

Refuge un peu bruyant, on part vite se coucher échapper à la foule avec un magazine et de belles images en tête, qui nous font oublier comme on peut être poisseux après 4j de ski. 

J5 : Refuge des Ecrins - La Bérarde par le Col des Ecrins

Itinéraire : Refuge des Ecrins - Brèche des Barres NE en AR - Roche Faurio en AR - Replat sous pointe Louise en AR - Col des Ecrins - La Bérarde

Horaires : Départ 5h20 - Brèche des Barres 7h30 - Roche Faurio 9h40 - Sous Pointe Louise 11h30 - Col des Ecrins 12h15 - La Bérarde 15h30

18km / 1450m D+ / 2850m D-

Encore une belle grasse mat avec un réveil à 4h30. Vu la foule on n'est pas bien efficaces pour partir, pas un drame aujourd'hui c'est tricot. La réparation de chaussure saute au premier chaussage, au moins c'est efficace. Pas grave c'est pas si gênant dans la descente sur le glacier blanc. Première montée en direction de la brèche des barres, NE on vise la poudre. C'est débonnaire sous la rimaye, au-dessus ça se raidit franchement. Facile à remonter dans les traces de Léo, la brèche est atteinte vers 7h30. Un peu de glace peu enfouie par endroit mais la neige est assez dense, ça devrait bien passer en descente. 

Léo descend. Je m'engage. Poudre compacte, pas mauvais, mais la pente m'impressionne un peu quand même dans le 50° continu, même en essayant d'oublier le sac lourd et la chaussure cassée. Heureusement j'ai mon Émeric pas très loin qui me montre comment la pente raide en poudre c'est méga facile. On profite donc tous les deux de cette belle descente. 

Second round à Roche Faurio, je commence à me demander si j'ai pas laisser mes jambes au refuge. Descente assez sympa en contournant les traces. C'est l'occasion de découvrir ce sommet.

Troisième round à la Pointe Louise, je commence à être cramée mais tient bon jusqu'à l'horaire limite de 11h30 pour rejoindre le Col des Ecrins. Encore une belle descente dans une face assez peu parcourue. Pas le temps pour le sommet, dechaussage sur le replat au-dessus des barres. Un sommet dont je n'avais jamais entendu parler mais pourtant sympathique. 

On rejoint le Col des Ecrins. C'est parti pour une via ferrata sur les câbles, puis un court rappel de 25m pour atteindre la neige. Descente en crampons de la partie expo. C'est un peu long et pas hyper palpitant. On rechausse pour la fin de la traversée dans une neige bien ramollie, avec un autre binôme. Le vallon de Bonnepierre est en neige bien lourde sauf la fin tassée sur sable. Après quelques clichés de la nivôse on sort du vallon rive gauche pour déchausser vers 2000m. 

Nous signons là la fin du ski pour cette boucle assez magique. Rando crocus pour finir jusqu'à la Bérarde après ce chouette périple.