Sortie du mardi 17 juin 2025
Etiennne
Conditions nivologiques, accès & météo
Météo/températures : Variable
Conditions d'accès/altitude du parking : 0m
Altitude de chaussage/déchaussage : Souvent proche de 2000m, voir 2300m en Autriche-Suisse
Conditions pour le ski : Globalement excellent, beaucoup de précipitations donc logiquement beaucoup de poudreuse. Moquette sinon en descendant dans le bon timing. Que du bon ski :)
Conditions nivo et activité avalancheuse : Un but plaque au Weißkugel et trop de neige à la Ciamarella, sinon globalement très stable.
Skiabilité : 🙂 Bonne
Compte rendu
Itinéraire suivi : Voir trace GPS
Horaires : 15 Avril - 14 Mai.
Le 15 avril dernier, Eneko et moi nous sommes lancés dans une aventure d'une trentaine de jours à travers 5 pays : la Slovénie, l'Autriche, l'Italie, la Suisse et la France.
L'idée du projet est de traverser l'intégralité de l'arc alpin en skiant le plus de sommets et de faces possibles, en s'adaptant aux conditions et à nos envies.
Résultat : 24 jours de pluie sur 29. Bon ratio, non ? 😅
Allez, je vous raconte !
Trieste, 15 avril 2025, Piazza Unità d'Italia.
Cela fait plus d'un an qu'on réfléchit à ce projet et ce jour-ci, c'est le jour J. On ne sait pas à quoi s'attendre mais on a sacrément hâte.
Il est 16h, voici les premiers coups de pédale. Avec nos skis sur les vélos, on détonne fort avec l'ambiance déjà estivale de Trieste, les regards se posent sur nous dès qu’on croise du monde, c’est assez drôle !
Première journée sur le vélo : 55 km pour s’échauffer. Les campagnes slovènes sont magnifiques, les routes tranquilles.
Une bonne pizza pour finir et dodo à la frontière.
Demain, une journée pluvieuse nous attend ?
La deuxième journée, et déjà beaucoup de problèmes.
La journée avait pourtant bien commencé, une belle piste cyclable dans la forêt sur 20 km.
Et puis catastrophe : je prends une branche dans le dérailleur et celui-ci explose.
Je ne peux plus pédaler, il reste 15 km jusqu'au prochain bike shop. Eneko me tracte avec une corde sur 10 km, puis je ne fais pas gaffe, mais la corde s’enroule dans la roue, hop, le câble du frein pète en deux. Belle performance après moins de 24h passées sur le vélo depuis le début du voyage.
Heureusement, le vélo se répare vite contre un beau billet...
On repart alors sous des trombes d'eau jusqu'à Bovec. Il fait vraiment froid, et on est intégralement trempés. Mais comment on va faire pour tout faire sécher ? La réalité, la pluie et le voyage à vélo nous rattrapent. En réalité, nos affaires sécheront seulement avec le retour du soleil, c'est-à-dire dans 3 jours...
Nous allons finir la journée sous un arrêt de bus, au moins on est à l’abri de la pluie.
Après une autre journée sous la pluie, on tente de skier le Triglav, avec une météo qui devait s'arranger en altitude, mais c'est raté :
Brouillard toute la journée.
Les fonds de carte, d'aspect plutôt accueillant, cachent en réalité des falaises (impossibles à voir dans le brouillard)... Les chemins nous envoient sur des via ferrata, très jolies mais ça prend du temps.
Arrivés à 2500 m, sur des pentes plus skiables, on est obligés de sortir la corde, la lancer devant nous pour voir le relief. 3h de GPS, 3h de descente pour 500 m de dénivelé négatif !!!
On arrive à un refuge à 1h, mais celui-ci est intégralement fermé.
Retour à la tente à 21h, trempés.
Sacrée journée épuisante...
C’est ce jour 5 où nous allons enfin vraiment apprécier le voyage et comprendre qu'on peut bien avancer ! Le bonheur.
Après un long stop à côté de la magnifique rivière de la Soca pour enfin faire sécher les affaires, on repart vers 14h pour une grande montée bien raide jusqu’au Passo del Predil et le Passo del Sella Nevea !
On passe la frontière et à nous les pizzas à 7€ !!
On retrouve la vallée et les villes, toutes plus mortes les unes que les autres, ambiance étonnante.
Encore une heure à rouler sur une magnifique piste cyclable pour poser la tente au milieu d’un champ.
Le jour 6, nous sommes obligés de donner tout ce qu'on a pour ne pas louper le micro-créneau de beau du lendemain.
Nous allons alors passer une belle journée dans des vallées perdues et typiques italiennes.
On choisit de passer par le Forcella Lavardet, une route interdite et connue pour ses glissements de terrain et ponts arrachés, mais sur internet j'ai cru comprendre que ça pouvait passer en vélo. Pari réussi, la route est magnifique, nous sommes seuls au monde, elle a sûrement été rénovée il y a peu.
On arrive donc à Campolongo, pas la même ambiance, bien touristique et chic !!
Dernière montée jusqu’au Passo Monte Croce di Comelico. Arrivés au col à 20h, épuisés.
On plante la tente à 22h pour un réveil à l’aube le lendemain.
Le jour 7, on profite d'un très court créneau de beau temps le matin, pour aller voir les Tre Cime.
Tellement beau ce coin, on en prend plein les yeux.
On profite un max, que c'est beau, en plus on a de la chance avec la météo. Moquette magnifique pour couronner le tout. Bonheur !
Retour au parking à 10h, la pluie reprend...
Jour 8, 9 et 10 sur la selle pour faire du chemin, surtout parce qu'il fait moche.
Difficile d’imaginer le prochain créneau de ski :(
Nous passons alors 3 belles journées sur la route bercés par les pistes cyclables, les cols et les belles villes italiennes.
Coup de cœur pour Merano, très très classe comme endroit !
Jour 11 : le retour du ski !
Réveil à 4h dans notre petite cabane de fortune, direction le Weißkugel à 3738 m.
Il fait froid, grand beau, ça sent bon !
On chausse à 2500 m, la poudre devient de plus en plus épaisse. Mais le vent forcit, et le sommet devant nous se perd peu à peu dans les nuages.
Il est 9h, on est sur l’épaule à 3500 m. Les rafales sont fortes, on est plongés dans un brouillard dense.
On signe le but ici... si proche du sommet, mais aujourd’hui inaccessible.
S’ensuit 1000 mètres de poudre magique, une belle récompense au final.
On déchausse laborieusement à 2200 m plein nord, assez effrayant pour un mois d’avril...
À midi, grande plâtrée de pâtes au pesto, puis on repart sur nos vélos.
Sauf que ma roue est de plus en plus voilée. C’est simple à réparer, mais sans les outils, c’est mort.
Premier magasin : pas de mécano. Deuxième : ils n'ont pas ce qu'il faut.
Pas grave, on pousse jusqu’à Nauders en Autriche, à 5 km.
On roule confiants... mais tout est fermé, on est complètement hors saison.
Je continue tant bien que mal avec la roue qui frotte contre le cadre jusqu’à Pfunds.
Là, en discutant avec des commerçants, on entend parler de Christian, un mécano vélo en ville.
Demain, la mission c’est de trouver Christian.
À suivre demain donc.
Jour 12 :
Lever à 7h, on va voir Christian !
On se fait très vite envoyer chier par l’hôtesse d’accueil qui nous dit que Christian ne travaille que le soir et qu’il n’aura pas le temps de s’occuper de nous.
Bon, bah journée de repos, c’est long mais ça fait du bien au corps.
Petite balade pour voir les alentours.
On commence à vraiment connaître par cœur ce village !
On s’endort sous des trombes de pluie, pour changer...
Jour 13 : le vélo et les bonhommes sont en forme.
Petite réparation bien chère à Pfunds et c’est parti pour la Suisse.
Belle vallée, beaux villages, belles pistes, que du plaisir.
En voyant un sommet au bord de la route très très classe, on décide d’aller y faire un tour demain matin.
En cherchant un spot pour planter la tente, on tombe sur une petite cabane toute mignonne, ouverte au public. On va dormir au chaud cette nuit !!!
Réveil pépère dans notre petite cabane.
Départ pas très matinal pour le Piz d’Esan : début sans neige un peu galère dans un canyon, puis la suite déroule parfaitement.
Sommet à 12h, les nuages se font de plus en plus imposants, il est temps de se casser d’ici.
Première partie magnifique en neige presque peuf ! Ensuite neige dure puis moquette.
En 5 minutes chrono on est en bas de la face, on avait besoin de se défouler !
Retour à la cabane, on mange, on se repose, on s’étale…
Et d’un coup, une voiture arrive. Le mec sort énervé, et nous sort un truc incompréhensible en allemand.
Il capte qu’on est français et balance avec un bel accent : "C’est ma maison."
On discute pas mal, il devient de plus en plus sympa. Sa femme arrive, et on rigole bien ensemble.
Ils nous offrent même du chocolat et des cookies. Beau revirement de situation ahah !
Ils nous invitent même chez eux pour boire un coup, avec un buffet de gâteaux. Du réconfort bien mérité.
On finit la journée par 20 km jusqu’au pied du Piz Bernina. On plante la tente à 2100 m, juste au bord du front de neige.
Demain, une belle et longue journée nous attend.
Au jour 15, nous sommes à la moitié du voyage et nous allons vivre une journée qui va particulièrement marquer le voyage.
Lever de soleil d’anthologie, neige parfaite et sommet mythique. Que dire de plus ? C’était fouuuuu !!
On aura même pu skier le Piz Bernina depuis le sommet !
Après cette solitude sur un beau 4000 m, on file vers le Piz Argient à 3945 m. Sa face nord glaciaire est magnifique.
Montée épuisante, mais la récompense à la descente : de la belle poudre et zéro trace.
Une sortie hors du temps. Chaque virage a une saveur folle après toute cette galère.
Comme si ça suffisait pas, l’aprèm on passe à vélo le Julierpass à 2284 m.
Quelle journée ! 3600 m de dénivelé et des souvenirs pour toute une vie :)
Le jour 16, on pensait se reposer et faire une petite approche ski…
Grasse mat' et même baignade dans un lac !
L’aprèm, c’est reparti pour 1000 m de dénivelé sur une petite route raide comme pas possible. Obligés de pousser les vélos 80 % du temps.
On monte jusqu’à 2200 m et on pose le camp dans une vieille grange avec nos amis les mulots.
Pour le jour 17, Direction le Piz d’Err.
Réveil à 7 h tranquille, on va pas se presser, c’est une face nord !
Magnifique matinée dans un vallon bien tranquille, encore bien enneigé.
Moquette de rêve sur 1000 mètres :)
On en avait besoin de cette matinée sans pression. Le moral et le corps commencent à fatiguer mine de rien !
Aprèm vélo, on est en forme et on pousse le plus loin possible. Cette vallée est superbe, la route longe la rivière. Une vraie pépite.
Et cette chaleur en ce début mai… on se croirait en plein été !
Jour 18 : Après avoir craqué notre PEL en Suisse, le retour en Italie se fait désirer.
La météo est tellement pourrie pour les jours à venir qu'on oublie l’idée de skier vers Zermatt ou Chamonix. De toute façon il pleut.
Direction le lac Majeur via le col du San Bernardino à 2069 m. Le col est fermé, mais grosse chance : il est dégagé jusqu’en haut, oufff !
Après une semaine en Suisse, s’envoyer une pizza géante à 7 €, quel plaisir fou.
Jour 19, 20, 21 et 22 : La Dolce Vita ?
Réveil en douceur au bord du lac, dès 7h on est sur le vélo, on longe le lac sur 20 km et hop, une grande focaccia, on n’est pas en Italie pour rien ahah.
On enchaîne ensuite les bornes sur des petites routes de campagne très sinueuses. Une ambiance qui me fait penser à la Castagniccia en Corse !
On arrive à Biella après 117 km et on croise Carlo, bien étonné de nous voir avec des skis.
Il nous propose de dormir chez lui après même pas 30 secondes à parler ensemble.
C’est de cette manière que l’on dormit au chaud dans un lit douillet après une bonne douche et une belle pizza. Le rêve quoi !
Le lendemain, il pleut des cordes. On a bien appris de nos leçons du début de voyage, pédaler sous la pluie c’est IMPOSSIBLE ! Les affaires mettent une plombe à sécher avec ces conditions froides et pluvieuses !
Réveil un peu longuet en attendant la fin de la pluie. On se met en route vers 10h : petite lessive à Ivrea, quelques courses au Lidl, et enfin la pluie s’arrête.
On reprend la route, à travers de petites routes et villages, on sent qu’on s’est bien éloignés des montagnes.
On parvient à esquiver deux ou trois grosses averses en se réfugiant sous des arrêts de bus… Ce soir, Rémi nous rejoint pour la dernière partie du voyage.
Les conditions s’annoncent bien meilleures jeudi matin, ça promet d’être impeccable !
Nous squattons les bars en attendant que les averses s’arrêtent, les journées peu efficaces s’enchaînent et un micro créneau de beau a l’air de se profiler.
Nous tenterons la Grande Ciamarella par sa face nord.
Jour 23 : On se réveille à minuit, bien motivés à en découdre.
Mais c'est l'hiver là-haut, les quantités de poudreuse sont impressionnantes, le brassage est débile, on évite chaque pente à 30°. On se rend vite à l'évidence : la Grande Ciam, ça sera pour une autre fois.
On s'offre tout de même une belle descente freeride dans une neige digne d'un mois de janvier.
Jour 24, retour en France
Après une matinée au café à attendre que la pluie s'arrête, on prend la route direction le col du
Montgenèvre. On croise des dizaines de migrants juste avant la frontière. Je n’ai jamais vu une frontière autant surveillée : il y a la douane, les policiers, et même l’armée !
Quant à nous, on passe la frontière avec les encouragements des policiers. Quel décalage...
Goûter obligé à la boulangerie, ça faisait trop longtemps. Puis on part pour la dernière montée — et pas des moindres — celle du Pré de Madame Carle.
On arrive à la tombée de la nuit. Sacrée journée de vélo : 120 km et 2700 m de D+, notre plus grosse journée sur le bike !
Dodo dans le luxueux (pour nous) refuge Cézanne. Que c’est bon de dormir dans un lit.
Pour le Jour 25, direction le col du Glacier Noir, la journée est annoncée au beau. On va se régaler !
8h, on est à 2500 m, il neige.
9h, l’éclaircie est enfin là, la vue sur l’Ailefroide et le Pic Sans Nom est magique.
On brasse fort dans la montée au col, mais on en arrive à bout à 12h.
On enchaîne très vite la descente, à moitié dans le brouillard. Sacrée ambiance !!
Bien heureux d’avoir skié cette magnifique ligne malgré le temps mitigé.
Grande sieste et repos salvateur l’après-midi.
Jour 26 : matinée inoubliable aux Dôme des Ecrins
Lever de soleil mythique, neige de rêve et beau temps de retour !!
Nous skions le couloir de Barre Noire dans des conditions idylliques, en grandes courbes !
On remonte au col de Grande Sagne pour skier son couloir sud et déchausser au vélo.
Bien fatigués de la matinée, on se laisse glisser jusqu'à Guillestre l’après-midi.
On croise Anouck, qui nous accueille chez elle ce soir. Pépite.
Jour 27 : plus dur qu'imaginé
Eneko a mal au genou, et ça empire avec le temps.
Grande réflexion à Barcelonnette, puis c’est décidé : Eneko arrête.
Mieux vaut privilégier la santé !!
La fin est brusque, mais c'est comme ça.
Je finirai l’aventure seul :(
Jour 28
Réveil à 3h, qui pique fort fort à Barcelonnette, direction le col de la Cayolle pour aller skier la peuf fraîchement tombée et profiter du beau temps.
Je suis collé, 3h de montée jusqu’au vallon convoité. C’était sacrément mental.
Petit changement de matériel et direction le Mont Pelat à 3050 m. La peuf est là dès 2000 m, les paysages sont magnifiques.
J’enchaîne 4 descentes en neige exceptionnelle, et même un petit 5.3 à vue, bien cool ce couloir NW.
Retour sur le vélo, je passe le col de la Cayolle rapidement : c’est le passage à vélo le plus haut de la traversée (2330 m) !
J’arrive par chance à éviter les grosses averses, pour une fois ahah.
Je roule tranquillement, et j’arrive soudainement à La Réunion, les paysages complètement fous. On ne se croirait pas dans les Alpes, c’est dingue.
Ce sont les gorges de Daluis, c'était magnifique.
Dodo tranquille dans un champ.
Sacrée journée de 3400 m de déniv ?
Jour 29 et fin : la mer en vue
Grande grasse matinée jusqu'à 8h, et petit déj dans une boulangerie. On est en France, il faut en profiter !
Je suis vraiment pas loin de Nice, alors je fais des petits détours par les petites routes pour profiter un peu de la journée.
Je passe par plein de villages super mignons, c’est très sympa. Mais d’un autre côté, j’en ai un peu marre de rouler, surtout sans objectif de ski derrière.
Pour finir la journée : 30 km de vent de face ultra fort, un plaisir.
Et puis j’arrive à Nice, l’ambiance est estivale. Je suis un peu perdu au milieu de toute la circulation et du monde sur la Promenade des Anglais.
Je ne sais pas trop où m’arrêter.
À un moment, je me trouve un banc devant la mer et je m’arrête.
C’est donc comme ça que le voyage se finit ? Moi, un banc, et la vue sur la mer !
Je reste une dizaine de minutes à rien faire.
C’est dur de réaliser que c’est fini, surtout sans Eneko.
Hâte de revivre des aventures à vélo-ski, peut-être avec plus de ski que de vélo cette fois-ci !
À bientôt sur le vélo :)
Quelques chiffres de l'aventure :
🚵♂ 47 000 m de dénivelé
🛣 1 950 km
🍕 Une quantité incalculable de bars et pizzerias squattés pour attendre que la pluie s’arrête
🛏 3 nuits au chaud grâce à la gentillesse des Italiens et des Français
⚖ Vélos chargés à 35 kg… et des cuisses qui s’en souviennent
⛄ 5 kilos de perdus
Et pour finir, un immense merci à Welt Bikes !
Ils nous ont fait confiance et nous ont fourni les vélos pour cette traversée. On a tout partagé avec eux : la pluie, les cols, les bivouacs et les galères… et on n’aurait pas pu rêver meilleure monture pour aller au bout.
Description des photos ce soir ou demain.
Bon été à tous :)