Départ : Route des Cottaves (1080 m)
Topo associé : Charmant Som, par les Cottaves
Sommet associé : Charmant Som (1867 m)
Orientation : E
Dénivelé : 800 m.
Ski : 2.3
Sortie du jeudi 15 février 2018
Conditions nivologiques, accès & météo
Pluie fine, plafond à 1500mEtat de la route : sèche
Altitude du parking : 1080
7h00 humidification du manteau en cours
Altitude de chaussage (montée) : 1080
Altitude de déchaussage (descente) : 1080
Activité avalancheuse observée : purges de neige imbibée
Skiabilité : 😐 Correcte
Compte rendu
Topo
La veille au soir, jour de Saint Valentin, Bottamor avait parcouru rapidement les CR dithyrambiques des sorties du jour sur Skitour. Il n'avait pas pu prendre une journée de congé, constatant d'heure en heure par la fenêtre de son bureau, qu'il aurait été très bien sur les skis, avec Phil et la bande... En fin d'après-midi, il avait même eu droit à un coup de fil de Phil, en mode "c'est vraiment dommage que tu ne sois pas venu ... gavage ... 5* .... etc ....".
Bottamor se dit que tout ce monde en faisait toujours un peu trop sur les forums, que la surenchère était de mise, qu'il fallait à tout prix récolter des commentaires élogieux, épater la galerie pour se faire un nom dans la galaxie.
D'autant que lui avait son plan pour le lendemain, un vieux rêve qu'il allait enfin réaliser en ce 15 février. Une traversée de Chartreuse depuis les Cottaves jusqu'aux 3 Fontaines, en passant par Charmant Som, la combe de l'If, la Cochette, Hurtières, la Grande Sure pour finir en descendant Jusson.
C'était ambitieux, il fallait partir tôt, tenir la distance et le dénivelé importants. Il fallait aussi arriver avant 16h34 pour attraper le car de la ligne 7000 qui le ramènerait jusqu'à la Diat via Saint Lau. Un petit bout de stop suffirait ensuite à retrouver la voiture aux Cottaves.
Certes le Calepin annonçait une forte remontée de la limite pluie-neige dès le matin, que d'aucuns analysaient comme un risque accru de purges de neige lourde. Certes la nébulosité prévue laissait à penser qu'on n'y verrait goutte, mais c'était loin d'être suffisant pour entamer le rêve de Bottamor. Et puis ces oiseaux de malheur s'égosillaient peut-être uniquement pour tenter de masquer une journée somptueuse en vérité, dont ils ne pourraient profiter, étant pris par d'autres obligations, comme Bottamor l'avait été la veille. La théorie du complot s'appliquait aussi au ski de rando ...
Bottamor s'élança des Cottaves à la frontale à 6h34 précisément, il avait prévu 10h pour la traversée, le car était à 16h34, il aimait jouer avec cette précision de l'horaire.
Passés les quelques mètres légèrement croûtés du bord de la route, il entra dans la forêt et sentit tout de suite que la neige collait sous ses peaux. Il essaya de ne pas y prêter attention. Il pensa qu'il lui suffisait de monter plus vite que l'isotherme 0° et qu'ainsi l'affaire serait vite réglée.
Ayant grimpé à peine 100m de D+, il fit une pause pour frotter énergiquement ses peaux avec un morceau de fart jaune. C'était infaillible, ça allait glisser comme jamais, fini le bottage ! L'accalmie fut de courte durée, le poids des skis allait grandissant.
Bottamor, constatant qu'il avançait moins vite que prévu, se dit que s'il ne franchissait pas la Grande Sure, il pourrait toujours revenir de la Charmette par le Mont Fromage, ce qui ferait quand même une belle bambée. Arrivant au niveau de Maubouchet, il s'étonna que ses jambes soient déjà un peu entamées, alors qu'il n'avait monté que 400m. Il bottait de plus en plus. Il se dit qu'il ne franchirait peut-être pas le col de la Cochette aujourd'hui, mais qu'il pourrait toujours revenir de la combe de l'If par le Collet. Ça restait une belle boucle.
Quand il entra dans le plafond nuageux vers 1600m, la pente était au plus raide et le manteau neigeux commençait à montrer des signes d'instabilité. Seule la trace était à peu près stable. Il se dit que les 50° du haut de la combe de l'If seraient peut-être un peu risqués avec cette neige épaisse de plus en plus mouillée. Il pourrait quand même descendre versant ouest jusqu'à la Charmette et revenir par le sentier Vernorel, ça faisait encore un tour honorable.
Le sommet du Charmant était une vraie purée de pois. Bottamor chercha un long moment le couloir NW qui permettait d'accéder à la combe ouest, puis à Pré Batard. Mais il n'y voyait qu'à 10m à peine, et plusieurs départs plongeaient dans la même direction. Lequel était le bon couloir, lequel finissait dans les barres rocheuses ?
Bottamor se résigna à faire demi-tour, tout en échafaudant aussitôt un plan B à Chamechaude. La cheminée ouest pour commencer, et après on verrait.
Il pleuvait à 1867m, la neige était déjà totalement imbibée en surface sur 10cm, les 40cm de neige lourde dessous se tassaient progressivement sous le poids. Si la neige ne collait plus sous les skis, elle s'accumulait par contre en gros paquets dessus. Chaque virage demandait un effort considérable. Bottamor découvrit par hasard les pseudo-virages torsadés, quand, après une flexion-extension énergique, le corps amorçait une rotation épaules-bassin, mais que les skis continuaient tout droit, les genoux se retrouvant alors en fâcheuse contorsion.
Plus bas, un virage un peu appuyé dans la partie raide, fit partir la moitié du manteau neigeux sur quelques mètres, Bottamor perdit l'équilibre et chuta lourdement. Il lui fallu un moment pour se dépêtrer de cette masse détrempée.
Enfin de retour aux Cottaves, la motivation pour le plan B était largement émoussée. Bottamor était trempé jusqu'aux os, il se dit qu'un bon café à la maison clôturerait avantageusement la tentative de traversée, et que ce n'était évidemment que partie remise.