100 ans après Mamie, dans le brouillard de Tré-la-Tête : à la recherche du Dôme des Glaciers

Massif : Mont Blanc
Départ : Chalets des Lanchettes (1960 m)

Topo associé : Aiguille des Glaciers, face Sud Ouest

Sommet associé : Aiguille des Glaciers (3816 m)

Orientation : SW

Dénivelé : 1750 m.
Ski : 3.2

Cette année, je ne voulais pas manquer de me pointer sur le versant gauche du bassin de Tré-la-Tête : en juillet 1924, mon arrière-grand-mère partait à minuit du refuge de Tré-la-Tête avec quelques grands noms du GHM (Lépiney, Lagarde, Ségogne) pour une collective que le mauvais temps aurait du écourter en simple excursion vers Tête Carrée. Las, le plafond bas les fit attaquer les pentes de la rive gauche trop tôt et ils débouchèrent dans la tempête sur l'arête frontière entre Tré-la-Tête et la Lex Blanche, toute retraite coupée par les conditions avalancheuses du raide versant français. Seule solution : s'échapper vers l'Italie, par le glacier de la Lex Blanche, dans le mauvais temps. Tentative par le glacier rive gauche barrée par un dédale de crevasses, remontée puis descente par le glacier rive droite, tentative ratée d'échappée par le col d'Estelette, et j'en passe de nombreuses : tout ce monde arriva finalement à minuit aux chalets de la Visaille, après 24 h d'efforts harassants au terme desquels Marguerite Picard ne dépareilla aucunement face à ces grands noms du GHM, que ce soit techniquement ou physiquement.

Donc le secteur de la Lex Blanche est dans mon collimateur pour cette fin de saison. Je louche sur un splendide tour (skitour.fr/topos/8687) depuis le val Veni permettant de passer (en sens inverse) sur une bonne partie de l'itinéraire de 1924 et débouchant sur la Lex Blanche avec retour par l'aiguille des Glaciers, mais c'est un peu au-dessus de mon niveau. Je me tourne vers le dôme des Glaciers, en espérant pouvoir pousser un aller-retour à la Lex Blanche par l'arête si les conditions sont bonnes, et j'embarque le zèbre Benzou dans l'aventure.

Mais voilà, les conditions ne sont pas bonnes ! Météo plus que maussade, absence totale de regel... Ce qui a au moins l'avantage de nous faire passer une soirée conviviale avec les gardiens de Robert Blanc, des copains de copains !

Ce samedi matin, départ dans une ambiance maussade, grise, humide. En remontant la moraine, je m'aperçois que j'ai réussi à oublier le piolet au refuge... Pas de quoi retourner le chercher : je sais déjà que les conditions nous limiteront au Dôme, et encore. La neige est tellement molle qu'à 3000 m, nous jugeons prudents de nous encorder sur le glacier. Une ou deux crevasses à proximité de la trace donnent à réfléchir sur la solidité des ponts de neige mouillée...

Dans les pentes finales, vers 3500 m, la visibilité baisse sérieusement, et je ne sais trop quand bifurquer à gauche pour rejoindre le dôme. Je m'y prends un chouia tard : quand nous débouchons sur l'arête, nous l'avons déjà passé et sommes dans les pentes menant à l'épaule nord. On n'y voit plus rien : on s'arrête à l'altitude 3600 m, on est plus haut que le dôme : on peut valider la sortie !

On rate une sacrée vue, c'est dommage, mais au final on a à peu près la même que Mamie il y a 99 ans, 10 mois et 2 semaines... Une petite pensée et on resdecend à l'aveuglette en suivant la trace. On ne retrouve un peu de visi que vers 3300 m mais il faut attendre la fin du glacier pour que la neige de névé mouillée se révèle skiable et même agréable ! Tant mieux, il y a 200 m de remontée bonus au refuge pour récupérer le piolet...

Conclusion : il faudra revenir pour les 101 ans !