Départ : Chalet du Gioberney (sentier du Ministre) (1571 m)
Topo associé : Pas des Aupillous, versant Ouest
Sommet associé : Pas des Aupillous (3103 m)
Orientation : W
Dénivelé : 1530 m.
Ski : 3.2
Sortie du mercredi 10 mai 2017
Conditions nivologiques, accès & météo
très beau temps, se couvrant à l'horizon W en fin de matinée - peu de ventEtat de la route : bcp de cailloux
Altitude du parking : 1571m
Altitude de chaussage (montée) : on aurait pu chausser au-dessus de l'avalanche vers 2400m mais j'ai préféré porter jusqu'en haut - Denise a chaussé sur le glacier
Altitude de déchaussage (descente) : 2000m - descente en rive G du vallon (enneigement continu) puis à env 2100m, traversée de la moraine à pied, descente du versant N de la moraine, traversée de la base de l'avalanche (non malaisée car ramollie) et aboutissement à la dépose des baskets (sous la cabane du Pis)
Activité avalancheuse observée : rien à part cette monstrueuse coulée précitée
Skiabilité : 🙂 Bonne
Compte rendu
Avec Denise
topo
On m'a toujours appris que ce qui était commencé devait être terminé. C'est ainsi que se vident les bouteilles et que s'atteignent les sommets.
Depuis la vallée, on croyait voir que le vallon du Pis s'était refait une santé. Rémission plutôt que guérison, sans doute. Mais qu'importe, une rémission devrait suffire pour terminer l'affaire abrégée le 24/4 parce que j'avais oublié le nolite timere devant quelques bancs de brumes. Et puisque le pis n'était pas arrivé, les Aupillous étaient à visiter sans tarder avant que l' autrement pis ne fasse arriver ses bus à leur pied.
La veille, soucieuses de nous attirer les bonnes grâces de la patronne des sorcières des neiges, et n'oubliant pas que c'était nuit d'esbat, nous sommes allées faire nos dévotions en un lieu aussi secret que charmant. Puis, après une nuit plutôt courte où dans mon insomnie toutes les chansons de Brel revenaient en ma mémoire et où, muettement, je fredonnais « non Denise, t'es pas toute seule, arrête de ronfler », nous revoilà parties pour de nouvelles aventures.
Sur la route du Giobernay, les lièvres étaient quasiment aussi nombreux et aussi gros que les cailloux qui jonchaient l'asphalte et ce n'est pas peu dire. La lune faisait de son mieux pour éclairer la vallée mais donnait la priorité aux cimes enneigées. En bas, les blind spot étaient nombreux bien que le généreux éclairage public chapellin desserve le moindre hameau.
D'autres signes de vie ont été aperçus dans les aulnes d'abord quand un rayon sélène atteignit un front blanc de chamois, un peu plus tard quand l'aube naissante permit de distinguer la vie sauvage du petit matin.
Le coucher de lune du côté du Champsaur fut somptueux et rien que cela a amplement justifié l'arrachement de sous l'édredon.
Le chaussage aurait théoriquement - théoriquement - pu se faire comme il y a 2 sem au niveau de la cabane du Pis. C'est là que nous avons laissé nos baskets et constaté l'étendue des dégâts : une avalanche monstrueuse avait ravagé le vallon du Pis sur au moins 300m de deniv. Le forfait datait vraisemblablement de la veille. Bien que c'était assez joli à voir (on aurait dit un grand bouquet de viornes boules de neige), nous n'étions quand même pas venues pour jouer à la pétanque. Mais, en dehors des boules, pas de salut : les bandes latérales étaient trop étroites pour être remontées à ski et, à pied, aucune portance. Va donc pour le chemin des boules. Surprise ! ça monte très bien comme ça. C'était sans compter les caprices des crampons belges et, après maints déchaussages, les bécassines du bricolage ont perdu un temps aussi certain que précieux pour y remédier enfin efficacement.
L'arrivée dans le cirque des Aupillous me mit dans le ravissement habituel et Denise me fit part d' impressions similaires. Recouverts de neige récente, les séracs résiduels étaient peu apparents de sorte qu'en me retournant un moment, je constatai que Denise, pour prendre un raccourci, passait très exactement à travers (heureusement pas AU travers).
Le soleil inondait déjà la pente terminale quand nous y arrivâmes mais un vent frisquet ralentissait le ramollissement. Là-haut, le plaisir de l'effort récompensé fut intense. Le Jocelme jetait sur nous un regard bienveillant l'air de dire : « je laisse passer le soleil levant sur le début de votre descente et vous procure l'ombre sur le glacier afin que vous puissiez avoir une descente de rêve ; ensuite, à vous de jouer pour ne pas perdre de temps dans le chaos que je n'ai pas pu empêcher ». Et ce fut ainsi et nous fîmes ainsi. Aupillous devrait être un synonyme du mot bonheur.
Et pour rendre hommage à la fois à ma valeureuse flamande et aux trésors de Chabournéou, je me suis permis de maltraiter pour vous l'une des émouvantes chansons de Brel
Le haut pays
Avec le Valgaudémar pour dernier terrain vague
Et des vagues de lune pour arrêter les vagues
Et de vagues rochers que les nuées dépassent
Et qui ont à jamais le cœur à marée basse
Avec des bancs de brumes à venir
Avec le vent de l'est écoutez-le tenir
Le haut pays qui est le mien
Avec des montagnes pour uniques cathédrales
Et de noirs clochetons dans la clarté sidérale
Où des diables en pierre décrochent les étoiles
Avec le fil des jours pour unique dédale
Et des chemins de soleil pour unique bonjour
Avec le vent d'ouest écoutez son tambour
Le haut pays qui est le mien
Avec un ciel si haut qu'un val s'est perdu
Avec un ciel si haut qu'il fait la fierté
Avec un ciel si haut qu'un glacier s'est pendu
Avec un ciel si haut qu'il faut le louer
Avec le vent du nord qui vient s'écarteler
Avec le vent du nord écoutez-le craquer
Le haut pays qui est le mien
Avec les Bruyères qui descendraient Surette
Avec la Vallouise quand elle devient chapelline Suzette
Quand les neiges de novembre nous reviennent en mai
Quand la vallée est frissonnante et remet son gilet
Quand le vent est au rire quand le vent est endiablé
Quand le vent est au sud écoutez-le chanter
Le haut pays qui est le mien.
















