Départ : Bellecombe (Parking) (2305 m)
Topo associé : Pointe des Broès, Face Nord
Sommet associé : Pointe des Broès (3405 m)
Orientation : N
Dénivelé : 1200 m.
Ski : 4.3
Sortie du samedi 8 juin 2013
Conditions nivologiques, accès & météo
bouchéeEtat de la route : ok
Altitude du parking :
2059Altitude de chaussage (montée) : 2300
Altitude de déchaussage (descente) : 2200
Activité avalancheuse observée : RAS (pas de visu sur les pentes proches)
Lieu | Alt. | Ori. | Heure | Qté. | Type | Com. |
---|---|---|---|---|---|---|
Praz Bouchet | 2000 | S | 3h30 | Soupe | Correcte | |
Bellecombe | 2300 | N | 4h30 | Croûte 50 cm | Irrégulière | Ca enfonce grave |
Ruisseau Vallonnet | 2400 | N | 6h | Croûtée et mouillée | Irrégulière | Ca enfonce grave |
Sommet | 3400 | N | 9h | Dure | Dure | Correct à partir de 2700 m |
Skiabilité : 😐 Correcte
Compte rendu
Parti pour une voie royale, je préparai minutieusement ma stratégie. Mais, tumultueux, mon cerveau s’interrogea sur ma capacité à obtenir les résultats escomptés.
Résolu à gommer les embûches, je me persuadai de me rendre au chevet de la belle demoiselle dont les appartements, difficiles à atteindre, ne favorisèrent pas ma tâche. D’ailleurs, je me répétais inlassablement cette phrase : demoiselle, ou dame ? là était le mystère. Il me fallait être alerte et agile pour progresser rapidement, sans pour autant me démunir d’un matériel dont je savais indispensable pour sauver ma peau.
Dans la clarté lunaire de la nuit, je m’écarta de ma couche et chemina au gré des pans de montagne éclairés et des ombres projetées des faces nord.
A la lueur du jour, une voix m’interpella :
Où cours-tu ?
Pris de cours, j’amorçai un balbutiement :
Je viens à votre rencontre. Je vous demande encore un peu de temps.
Tu es lourd, répondit-elle. Tu veux me grimper dessus alors que nous venons à peine de nous rencontrer...
Cette phrase me cisailla et me remit à ma place. Homme, il était dans mon devoir d’anticiper les débats. En effet, chacun savait que l’approche devait être étudiée et tous les détails décryptés. Les femmes sont comme ça, improbables. Un jour elles sont toutes gentilles, le lendemain, vous vous retrouvez dans le brouillard, voire dans la tempête alors que le décor n’a pas changé… Comment faire ?
Je rétorquai, l’air maladroit :
A vrai dire, à peine n’est pas le bon mot, je vous ai déjà rencontrée…par le passé…
Je m'efforçai d’interpréter cette pensée : lourd ? comment pouvais-je être lourd ? Ma démarche ? mes moyens ? mes paroles ? mes actes ? bref, que de questions transitaient dans mon esprit. Mais je ne me laissai pas démonter et prudemment, je m’exposai petit à petit à celle dont je ne savais pas encore, si c’était la première fois ou pas.
La première partie se négocia adroitement. La peau lisse et ferme me permettait de gravir les échelons sans sourciller. Vint ensuite la seconde moitié de l’opération : le soleil dorait sa peau et je risquais de glisser sur les gouttelettes issues de la transformation des flocons méticuleusement positionnés…je sortis mon artillerie.
C’est vrai que mon sac pesait lourd…et je regrettais à nouveau d’avoir chargé la mule comme on prépare un voyage de noce…
A chaque attaque, je faisais le même constat : en enlevant mes crampons et piolets de mon sac et en passant ma corde en bandoulière, je m’alourdissait inexorablement…le délestage étant moins conséquent que le relestage par mes spatules trop longues, pesant 4 kg..., mes peaux mouillées..., mes bâtons…, et pour couronner le tout, les mousquifs dormant dans le sac avec les broches et les sangles...
Tu fais quoi ???
La voix résonna comme la foudre dans les rochers…
J’analyse…
Il me semble que ton analyse a tourné comme une bouteille de lait au soleil…
Je me souviens…
Le rapport proportionnel d’analyses fausse et vraie entre une personne qui hallucine, et une autre comme toi, qui boit du jus d’orange, certes peut être fermenté, mais je n’en n’ai pas le souvenir, est délicat à expliquer, mais aisément définissable, n’en conviens-tu pas ?
J’accusai…
Certes, dis-je dans un souffle…
Alors, relâche-toi et grimpe.
Sans hésitation, je pris mon courage à deux mains et je forçai le destin.
La suite du couloir fut négociée sans souci. La neige porta rigoureusement bien et mes multipointes de cascade, peu adaptées aux circonstances, me firent oublier les douleurs naissantes dans mes cuisses…
Arrivé au sommet, stupéfait d’avoir réussi mon coup, la belle dame m’accueillit…ce n’était pas la première fois…Mais diable, que ce fut dur… Mes bras, cisaillés par les bretelles du sac, maudissaient mon cerveau dont les éternelles suspicions du « si on n’a pas assez, que fait-on »…engendraient une surcharge bien inutile….
La prochaine fois, je serai léger dis-je.
C’est très bien rétorqua-t-elle…je suis à toi maintenant, mais prends garde, ne franchis pas les limites...sinon je pourrai me fâcher
J'acquiesçai de la tête comme un enfant devant sa maîtresse...et timidement, chuchotai :
Même si je pense me maîtriser en montagne, vous demeurez néanmoins ma maîtresse...
Elle esquissa un rictus et me salua affectueusement
Je lui baisai sa main, sautai dans mes fixations et décampai
Puis elle laissa déambuler sa peau lisse au soleil et je n’eu qu’à l’effleurer pour sentir la plénitude…douce, elle était douce à souhaits…serein mais un peu mélancolique, je lui dit au revoir au moment où je la quittai du regard…c’est sûr, je la reverrai…
Commentaires
Bravo !
Un peu de lecture sympa en fin de saison avant les vacances, merci pour ce bon et beau compte-rendu un peu décalé... Un cr pareil donne quand même rudement envie de voir des photos de la dame/demoiselle en question...
Filer une métaphore pareille jusqu'au sommet, c'est une performance!! très drôle! 😄 😄
Bé, j'croyais que j'serai ds la soupe...et j'ai pas pris mon appareil...mais dès qu'il fait beau, je saute sur la Nord Est...tiptop à vue...avec toute cette neige !!! 😉
Est-ce que la route est praticable jusqu'au Coëtet (2059m) ou doit-on se garer au Suffet ? Merci.
Sans vouloir critiquer ton âme de poète il faudrait penser à aller au bout de tes conjugaisons ça devrait donner:
je prépara minutieusement ma stratégie
je me persuada de me rendre au chevet
etc
😉
ah non, désolé, "préparai" au passé simple..."je me prépara" n'existe pas ... 😎