Météo/températures : bâché jeudi matin, se découvrant durant l'après midi. Fort vent d'ouest.
Ce lundi la classique pinte de Tropical IPA avait une saveur particulière à Atome. Peut-être parce qu'elle débutait une semaine sans enfants. Peut être parce qu'elle était accompagnée d'un smash burger. Et certainement parce que la météo annonçait un créneau de beau jeudi vendredi précédé d'une perturbation.
Manu s'imaginait déjà ouvrir un nouvel itinéraire (en fait déjà referencé dans le toponeige et dans le livre aux cotations facétieuses d'A. Baud), et je nous voyais dans un couloir à 4000m full poudre (alors que la Chamoniarde avertissait sur une probable rimaye déversante).
Revenus à la raison, nous sortions ce plan, que Manu m'avait sussuré au début de l'hiver, d'un bivouac aux confins du Val Veni pour se faire exploser les cuisses dans des couloirs de 1000m.
Retour à l'état sauvage.
Enfin pas vraiment puisqu'on a eu le bruit des hélicoptères au dessus de nos têtes 50% du temps et que Manu avait pris soin de prendre de quoi se brosser les dents.
Ded flaire le bon coup et mobilise mère et grand mère pour se dépêtrer de sa fille (des bisous à toutes les mamans !), et nous voilà à 3 au sortir de la rutilante BMW sur le parking du tunnel du Mont Blanc.
Pas peu fiers de notre pulka du pauvre, on débute notre long périple sur la route enneigée du Val Veni. Après 3min de quiétude on se fait doubler par une première motoneige... Puis par environ 1 toutes les 10min. Retour à l'état sauvage qu'ils disaient...
"Est-ce qu'ils nous prennent pour des idiots ou est ce qu'ils se disent qu'ils ont l'air de sacrés pinpins sur leurs traînes couillons ?" Tout est question de point de vue...
Heureusement celles ci ne vont guère plus loin que les remontées mécaniques, et nous avons tout loisir à profiter du passage par Freney et la Visaille avec leur lot de souvenirs (cf saison 8 et saison 14 de la série "les sorties de printemps que n'approuve pas ma compagne").
A proximité du lac Combal la première pente en devers est critique pour notre chargement, qui bascule dans la pente.
"Deeeeeed, les bièèèères !!!"- à prononcer de la même façon que "Moniiiiiiiique, tes skiiiiis !!!".
Le blizzard s'abat sur nous au même moment pour renforcer l'intensité dramatique du moment.
Rusés, on développe la technique du "un qui la tire, un qui la (re)tient" qui nous permettra de passer les obstacles jusqu'à prendre pieds sur la défunte langue glaciaire de Miage, dans un thalweg abrité du fort vent d'ouest, qui formera notre nid pour la prochaine nuit.
Picnic sous les premiers rayons de soleil de la journée, top confort sur le banc formé par notre luge retournée (#macgyver).
Plutôt qu'une bonne sieste on décide ensuite d'aller se faire rouster par le vent sur le glacier.
On tente d'abord rive droite dans le couloir NNE de gauche du petit Mont Blanc. C'est beau, c'est bon mais c'est trop chargé par les spindrifts en provenance des falaises. Demi tour après le déclenchement d'une petite plaque de surface. "si il y a doute c'est qu'il n'y a pas de doute".
On file sur l'autre rive faire un contre la montre avec le soleil, non sans avoir préalablement bien zyeuté l'enchaînement des pentes de neige sous Quintino Sella :)
Le suspens de la course est similaire à celui du match Saint-Brieuc / PSG. On est un peu rôtis et ce couloir que l'on souhaitait rapidement borgne fait quand même 450m de haut.
La vue d'une grande goulotte est salvatrice. On file vers le bas et après un peu de pousse bâtons on se retrouve au (mi) chaud sous la tente pile pour l'heure de l'apéro !
Repas de type bivouac (c'est à dire bien moins savoureux que l'apéro), nuit moins froide que prévue (sauf pour nos gourdes d'eau) et réveil comme des fleurs à 7h.
Un café qui réveille les morts et quelques aléas de gestion de popote sur réchaud plus tard, on reprend notre contre la montre avec le soleil, mais en sens inverse cette fois-ci. Tels les rugbymen français contre les italiens, c'est avec la victoire assurée que nous foulons le gazon de Miage.
Un peu lassés par le jeter de viande qui s'opère quasi systématiquement dans les couloirs fins qui ne sont pas en neige dure, on jette notre dévolu sur le couloir SW du col du Brouillard, dont les pentes relativement larges nous ont fait saliver la veille.
"j'ai des jambes de feu les gars aujourd'hui, faudra pas plus de 3h pour aller en haut" avais-je présomptueusement annoncé à la sortie de la tente.
4 grosses heures plus tard, la Noire (l'aiguille, pas la mer) s'impose enfin face à nous.
Quasi 1000m de couloir dans de la neige relativement profonde, ça fatigue ses hommes. Sans regret, le timing est optimal pour la descente.
Neige froide exquise sur la moitié supérieure, neige de transition au dessus du crux et neige revenue presque à point sur le bas.
"Le crux, quel crux ?!" se dit le lecteur attentif.
Le crux, c'est là où à la montée on a pris la branche de gauche avec un bon ressaut en neige glace mixte sur 5m, mais où on s'est dit que ça sauterait à l'aise en ski dans la branche de droite.
Mais en fait, malgré toute la foi de Ded, le saut à skis s'avera impossible. Et comme on a pris la corde pour toutes les activités (siège de picnic, coussin de dodo, décoration de pied de couloir) sauf pour celle ci, ça a fini en saut "banzai" à pieds, très photogénique.
Plus de vidéos sur l'Insta de Ded @dedlebarbu
Démontage de bivouac express, gestion de l'ensemble du paquetage dans et hors les sacs et accrochage de notre pulka de fortune sur le dos de celui qui a le plus un style de luge à foin (elle est cadeau celle là Manu, comme ça tu insisteras peut être moins la prochaine fois pour que je fasse le CR :p)
Les mioches étant à récupérer à Marseille ce soir, pas le temps pour le classique et (en principe) incontournable pizza bière à Courmayeur.
Heureusement l'échoppe du tunnel nous assurera les victuailles nécessaires pour couronner ces deux jours sur le thème indémodable du 'ski gras et bières'.
Place maintenant à une semaine chez les pioupious et aux sorties collant pipette pendant ce temps !