Départ : La Palud (Pointe Helbronner) (3462 m)
Topo associé : Mont Blanc de Courmayeur, Arête de Peuterey
Sommet associé : Mont Blanc de Courmayeur (4748 m)
Orientation : T
Dénivelé : 3600 m.
Ski : 5.4
Sortie du dimanche 21 juin 2020
Conditions nivologiques, accès & météo
Beau, quelques développement de cumulus les après-midi. Beaucoup de vent au dessus de 4000m, des rafales à plus de 100km/hEtat de la route : RAS
Altitude du parking : 1570
Neige variable, dure dans les couloirs, profondes sur les glaciers et dans les zones moins raide globalement
Altitude de chaussage (montée) : 2600
Altitude de déchaussage (descente) : 2600
Activité avalancheuse observée : RAS
Lieu | Alt. | Ori. | Heure | Qté. | Type | Com. |
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Glacier du Brouillard | 2700 - 3500 | S | 12h | Transfo lourde | ||
Couloir Eccles | 4000 - 4300 | S | 10h | Dure | ||
Arête de Peuterey | 4300 - 4700 | E | 8h | Dure |
Skiabilité : 😟 Médiocre
Compte rendu
Montée par le bivouac Eccles depuis le Val Veny
Les skis posés à côté du lit me faisaient de l'œil chaque matin, il fallait qu’on les ressorte avant que l'été nous entraine vers d'autres horizons. Les sortir OK, mais pas question d'aller dans la queue leu-leu du Gerva ou d'autres lignes du type, ma maman m'a dit de respecter la distanciation sociale. Ce sera donc une ligne sauvage en mode éthique, pour être sûr d'être peinard. On fait le tour des quelques mythes qui peuvent tomber en condis en fin de saison, et l’évidence apparait : faut aller à l’arête de Peuterey. Me demander pas pourquoi celle-ci, les infos sont bien maigres mais la motivation est plus grande que la montagne à grimper et nous pousse à aller poser les spatules là-haut. Parfait c’est validé, maintenant reste à connaitre la stratégie. On a dit éthique, ce sera donc sans la benne. Et si on montait par Eccles ? Certes ça fait du déniv’, mais c’est beau et c’est bien là l’essentiel. Aller, on part là-dessus.
Dodo à la belle dans le Val Veny pour être d’attaque le samedi. On décolle à 6h du parking pour s’enquiller les 1100m de D+ en basket, puis les 1200m de D+ restant en ski. Arrivée à midi bien tapé au bivouac Eccles, on a bien sué sur les derniers 200m en plein cagnard mais ça a fait. Maintenant atelier fonte de neige, repas, étirement et surtout repos.
Le réveil est fixé à 1h30, on part direct au-dessus du bivouac et on trouve une belle pente de neige qui permet de rejoindre le pied du col Eccles en traversée : « la chatte » comme dirait un certain B. Paire. Montée au col Eccles tout en neige, puis désescalade de l’autre coté tout aussi bon. On prend pied sur le plateau suspendu du glacier du Freney et on trace direction le col de Peuterey. Arrivé au col il fait encore nuit, et là on commence à douter. Il n’y a que des bastions rocheux au-dessus de nous, rien ne ressemble à un couloir skiable.
On est proche de la signature du but rimaye, mais on se dit qu’on va quand même aller jeter un œil au pied de ce qui est censé être le couloir. On se lance alors dans 20m de mixte bien raide, et finalement au-dessus c’est vachement mieux, il y a même de la neige ! On traverse à gauche et on tombe dans le fameux couloir, qui est plus sec qu’espéré : quelques ressauts et étroitures se dessinent à mesure qu’on monte. Une fois à la moitié du couloir, ça s’élargit grandement et tout s’arrange. Enfin tout sauf le vent, qui commence à être costaud et qui fait tournoyer la neige au-dessus de nos têtes. On arrive sur l’arête au niveau du Grand Pilier d’Angle, et effectivement, le vent est bien bien fort : bon on va essayer de s’en protéger au maximum.
On poursuit la montée sur la majestueuse arête de Peuterey, puis arrive la fameuse traversée souvent en glace. Effectivement la glace n’est pas loin, mais une petite couche de neige nous laisse espérer un passage en ski. On poursuit la montée sur la pente finale et on sort à une brèche 20m sous le MB de Courmayeur. Là ça ronfle vraiment, on se fait coucher par les rafales. Hop là demi-tour, la sortie au Mont Blanc ne sera pas pour cette fois. Travaux BTP pour creuser un trou et attendre que le soleil fasse son travail pour adoucir la pente supérieure. Mais avec ce vent la neige n’a pas l’air décidée à se ramollir, alors que nous on se refroidit franchement.
Bon ben à l’ancienne, on chausse et c’est parti pour des sections de ski bien raide en neige dure, mais heureusement avec un bon grip. On trouve tout de même quelques endroits de neige transportée, plus douce pour les skis comme pour les oreilles. On arrive à la traversée, qui va être négociée en bon gros straight avec perte d’adhérence en prime, mais ça passe. Attention, avis aux suivants : c’est bien bleu maintenant. On ski l’arête esthétique et puis on plonge au-dessus du GPA. La pente s’adoucit tout comme la neige, et en plus le vent se couche. On peut ressortir le téléphone pour faire quelques photos sans perdre une main, c’est déjà ça. Les virages s’enchainent dans une ambiance magistrale, et nous voilà déjà dans l’entrée du couloir Eccles. On recreuse un trou pour (encore) attendre que le couloir décaille un peu, mais notre résistance au froid a ses limites, on repart donc aussi sec dans un couloir semi-revenu. La première moitié se ski bien, puis arrive un bon ressaut. On pose une cordelette, petit rappel et ça continu. On joue un peu du piolet pour les étroitures suivantes, puis on rechausse les crabes pour les 100 derniers mètres du couloir, qui manquent tout de même d’enneigement. Nouveau rappel pour la section mixte raide du matin et on est en bas de la face.
Grande traversée sur ce plateau magnifique et sauvage sous les piliers du Freney et juste au-dessus de la chute de sérac (impressionnante) du glacier. On reprend les traces du matin dans le col Eccles, montée en pleine chaleur cette fois ci. Chaussage au col, quelques virages de neige froide et on atteint sans déchausser la boite de conserve qui nous a servit d’hôtel. Aller on remballe les affaires, c’est l’heure de rentrer. En deux rappels on est sur le glacier du Brouillard où on trouve quelques bons virages en transfo. On retrouve ensuite nos baskets adorées pour se farcir la descente jusqu’au parking, si rapide et pourtant si longue avec les sacs chargés et la fatigue accumulée.
Finalement un beau mythe de skié et même si les conditions n’étaient pas aussi bonnes qu’espérées, on rentre heureux comme des papes d’avoir pu caler des virages sur cette arête de rêve. On range les skis avec le bon goût de la saison achevée, à l’année prochaine !