Rocher de l'Aigle - infos nivologiques

Massif : Queyras - Alpes Cozie N
Départ : Montgenèvre (1850 m)

Orientation : NW

Dénivelé : 700 m.
Ski : 1.3

Altitude de chaussage/déchaussage : on chausse au col à 1850 m, mais on déchausse autour de 2000 m l'après-midi.

Conditions pour le ski : bonnes au-dessus de 2200/2300 m (en restant surtout sur les pistes), peu de neige plus bas.

Pendant que les collègues analysent les conditions nivologiques dans le vallon du Crachet au col de Vars, je suis allé faire un petit tour sur mon temps perso du côté de Montgenèvre.

La perturbation météo de la veille a malheureusement apporté de la neige seulement au-dessus de 2000/2200 m en général dans les Alpes du Sud. Mais 2 secteurs en particulier ont vu des limites pluie-neige inférieures à 1700/1800 m (alors que la masse d'air était globalement la même), grâce au phénomène d'isothermie : le val d'Allos et le secteur de Montgenèvre.

Phénomène fréquent dans les vallées de l'est des Hautes-Alpes, l'isothermie refroidit l'atmosphère à 0 °C, grâce à l'absorption de chaleur nécessaire au changement d'état de l'eau (du solide au liquide ou du liquide au gaz).

Une rapide explication du phénomène en vidéo sur la chaîne Youtube de Météo-France : https://www.youtube.com/watch?v=rsaAZxipwqA

Conditions nivo et activité avalancheuse :

*3 cm de neige humide au col à 1800 m dans le brouillard, mais c'est suffisant pour chausser et monter sur les pistes. Pas beaucoup plus à 2000/2100 m, 5 cm toujours humides, mais la neige croûte dès que le brouillard se lève (perte d'énergie rapide par rayonnement avec le ciel clair = refroidissement et regel de l'eau liquide qu'elle contient). En cas d'isothermie, comme la neige tombe à une température de 0 °C, elle est humide sur une grande tranche d'altitude (parfois plus de 1000 m !).

A partir de 2300/2400 m, 10/15 cm de neige fraiche (de moins en moins humide à mesure que l'on monte) sur une grosse croûte très dure. Parfait pour skier sur les pistes malgré la faible épaisseur.

*Analyse du manteau neigeux au sommet vers 2600 m : environ 40 cm de neige totale en expo N/NE, pente à 30 °.

15/20 cm de neige fraîchement tombée qui repose sur 20/25 cm de faces planes/gobelets (couche fragile). Cette couche fragile est parfois légèrement croûtée, probablement suite à l'humidification liée au temps doux, nuageux et venté du vendredi 14 novembre. En effet en cas de temps nuageux et venté, l'humidification touche aussi les pentes ombragées, contrairement aux situation de ciel clair où la neige reste froide dans ces pentes, même avec une température de l'air largement positive !

Résultat des tests de stabilité (hauteur en cm indiquée depuis le sol) :

CT11@20cm PC : rupture au 11e coup dans la couche de faces planes / gobelets, qui ne se fait pas sur un plan propre, mais sur une zone irrégulière de plusieurs cm de hauteur.

ECTN7@20 cm : rupture au 7e coup dans la même couche que pour le CT, mais la propagation ne se fait pas sur le bloc entier (seulement sur environ 1/3 du bloc de 90 cm).

*A 2600 m dans ce secteur, on observe bien une structure de plaque : 1) une plaque = la neige fraîche ventée et 2) une couche fragile (persistante) = la couche de faces planes / gobelets.

Sauf que l'humidification partielle puis le regel de la couche fragile la rend moins réactive : les ruptures ne se font pas sur un plan propre et la propagation semble difficile, diminuant la probabilité de faire partir la plaque. Cette plaque est de toutes façons peu épaisse compte tenu des quantités de neige fraîche limitées.

Dans les pentes ombragées à plus haute altitude, la situation est peut être différente : l'humidification n'a probablement pas altéré les propriétés de la couche fragile, rendant le déclenchement d'une plaque plus probable.

Romain