Départ : Cauterets (Pont d'Espagne) (1459 m)
Topo associé : Picos de la Frondella, Tour Panticosa Pico Frondellas Marcadau
Sommet associé : Picos de la Frondella (3054 m)
Orientation : T
Dénivelé : 4400 m.
Ski : 3.1
Sortie du mardi 23 mars 2021
Conditions nivologiques, accès & météo
Grand beau sans vent les 3 premiers jours, voilé le dernier jours
Etat de la route : ok
Altitude du parking : Pont d'Espagne
D'une manière générale, neige de printemps, décaillée dès 11h vers 3000 m, agréable à skier jusqu'à 2000 m bien que s'alourdissant dans l'après-midi.
Seule la pente N sous le col Marcadau était en poudre, le premier jour, jusqu'à 60 cm d'épaisseur, demandant de l'attention, mais ça a dû se stabiliser depuis.
Altitude de chaussage (montée) : Pont d'Espagne, puis déchaussage conséquent pour rejoindre le refuge Wallon, après quoi on ne quitte plus les skis.
Altitude de déchaussage (descente) : refuge Wallon, tout a fondu en quatre jours en-dessous jusqu'à Pont d'Espagne, imposant 400 m et 8 km de portage.
Activité avalancheuse observée : des coulées de pentes raides, bien stable sinon.
Skiabilité : 🙂 Bonne
Compte rendu (par Rémo Barbaruli)
« Soldat Barbaruli, au rapport !
- À vos ordres mon général !
- Rapportez-moi par le menu votre exploration des terres d’Aragón.
- Ils sont forts mon général. Très forts ! Ils ont commencé par nous imposer un ciel bleu à se faire péter la rétine, on en a oublié le dentifrice dans la voiture !
- Voilà qui est fâcheux. Comment vous en êtes-vous sortis, 4 jours sans se brosser les dents ça doit commencer à sentir le chacal...
- Oui et pas que de la bouche, vu qu’on a commencé par 8 km de faux plat sous le soleil jusqu’au refuge Wallon, puis 600 m de bottage intergalactique pour...
- Je vous arrête tout de suite première classe Barbaruli ! Pas de « bottage intergalactique », pas de « neige dure bon grip », pas de « hold-up » ni « neige de cinéma » avec moi. On n'est pas sur skitour ici ! Poursuivez.
- Euh... enfin bref on n’est pas allés à la Pointe de la Muga comme initialement prévu, la troupe était trop fatiguée.
- Mauvaise excuse mais admettons. Et pour les dents ?
- Ben on a essayé le gel hydroalcoolique.
- Un choix audacieux ! Et ?
- Ça décape mon général. Un peu comme se brosser les dents à la Chartreuse Verte.
- Pas de chauvinisme. Ensuite ?
- Descente sans encombre jusqu’au refuge de Bachimaña. Où ils nous attendaient.
- Qui donc, soldat ?
- Une quinzaine de prétendants à la Guardia Civil de Montaña. Des cuissots comme ça, ô capitaine mon capitaine.
- Général. Et arrêtez les références à la noix !
- Pardon mon général. Et que ça rigole, et que ça gueule, un peu comme des Italiens quand ils savent qu’ils auront de l’amour et du vin.
- Passons je ne veux rien savoir de ce qu’il se passait dans les dortoirs.
- Justement mon général, on était dans une chambre à deux. Du désinfectant et du gel hydroalcoolique partout, une douche et des wc privés...
- J’avoue ils sont forts ! Et pour les repas ?
- Bon, là il faut avouer que ça a beau être des étrangers, ils mangent et respirent par le même orifice, difficile de dire qu’on était à l’abri du virus...
- Vous irez me faire un test PCR dès que vous aurez rédigé votre compte-rendu. Et pour le ski ?
- Deuxième jour, montée sans encombre au très beau Pico de Tebaray. Personne sur l’itinéraire de refuge à refuge, impensable chez nous ! Soleil de plomb et neige de printemps.
- Voilà, de la concision, continuez ainsi !
- De nouveau douche et wc au refuge de Respomuso.
- Ah oui ils sont forts !
- Encore plus que vous ne le pensez mon lieutenant,
- Général !
- Général oui. Les Guardia Civil de Montaña nous y ont rejoints, je pense qu’on avait été repérés...
- Je ne vous félicite pas...
- Ils étaient passés par un autre itinéraire pour nous surprendre. Et ils ont fait une incursion en poudre versant français ! L’honneur national est en péril !
- Inadmissible ! Enfin en même temps vous étiez bien en Espagne, vous. Passons.
- En plus il y en avait un très sympathique qui parlait très bien français - au passage votre stage accéléré d’espagnol en 3 jours n’est pas très probant.
- Dites-donc vous voulez retourner graisser les chenilles de chars ? Et j’ajoute « pactise avec l’ennemi ».
- Non mon général, pas le graissage de chenilles ! Je vous dis la suite : superbe course en aller-retour le troisième jour au Picos de la Frondella, cramponnage, belle pente, et ciel voilé, ce qui veut dire qu’on voyait un nuage au loin. Les Guardia Civil ont fait la trace, et sont redescendus de l’autre côté. Vraiment ils ont tout fait pour nous amadouer.
- Aucun signe d’agressivité ?
- En fait si mon général. Je pense qu’on a découvert leur arme de destruction massive. « El Zumbador » qu’ils appellent ça.
- Dites-m'en plus.
- Nous étions 3 dans un dortoir de 12. Le troisième ronflait comme jamais je n’ai entendu. Et vu que les bouchons d’oreille étaient restés avec le dentifrice...
- Je prends note. « El Zumbador », arme de destruction massive. À propos du dentifrice, comment étaient les relations dans la cordée ? Vous arriviez encore à vous parler ?
- Oui mon général, d’autant plus que nous avons découvert que le savon fonctionne aussi bien que le gel hydroalcoolique, mais sans le côté gnôle.
- C’est bien ça. Vous mettrez ça dans notre nouveau référentiel de survie ! Et le dernier jour ?
- De nouveau solitude intégrale depuis le refuge de Respomuso jusqu’au refuge Wallon. La pente NW de Peña Aragón n’étant pas skiable, nous avons pris l’initiative de skier sa belle pente S et ne pas aller au Pic de Cambalès.
- Je ne vous ai pas déjà dit que l’initiative était un geste spontané et généralement malheureux ?
- Peut-être mon général mais la descente du col de la Fache était aussi très belle et vu que le plat entre Wallon et Pont d’Espagne était aussi long et plat à la descente qu’à la montée, on n’était pas fâchés d’arriver avant le couvre-feu ! Et à Lourdes où on a fait étape, il y avait une pizza végétarienne qui nous attendait avant qu'on ne la commande, si ça c’est pas un miracle !
- Encore des excuses et des fariboles. Soldat, vous trouverez la graisse pour les chenilles dans l’entrepôt "Pyrénées" !
- Ok mon général, mais on pourra avoir du dentifrice ? »
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Quatre jours de très bon ski et de solitude dans le versant soleil des Pyrénées, massif qu'on ne connaissait pas ou peu, en tout cas pas l'hiver. Une vraie chance d'avoir découvert par hasard que les refuges y étaient ouverts. Merci à l'auteur de ce topo, quand on ne connaît pas du tout les lieux, c'est vraiment très utile pour se donner des idées ! Merci aussi à ceux qui nous ont renseignés sur le forum, nous convainquant que ça valait le coup de mettre à profit notre semaine de vacances pour voir du pays !