Départ : Val Thorens (2300 m)
Topo associé : Pointe Rénod - sommet E, par le Glacier de Chavière, depuis Val Thorens
Sommets associés : Pointe Rénod - sommet E (3368 m) Mont de Gébroulaz (3511 m)
Orientation : T
Dénivelé : 2620 m.
Ski : 2.3
Sortie du dimanche 15 mai 2022
Conditions nivologiques, accès & météo
Altitude de chaussage/déchaussage : juste après le pkg, qq mètres plus bas
Activité avalancheuse : rien sur le temps des courses sauf une importante chute de pierre descendant de l'Aig des Sts Pères en J2
Skiabilité : 😐 Correcte
Compte rendu (par taramont)
Le four devient de plus en plus chaud. Et nous voilà dans le pétrin. Cependant, les vanoiseries n'ont pas cramées mais nous, un peu.
Comment résumer la situation ? Les deux courses avaient un tronc commun, et pas le plus attrayant. Commençons donc par cela.
D'abord vous cherchez dans les dédales d'une ville fantôme où garer votre voiture et prendre pied sur la « neige ». Vous partez dans le glauque, dans la montagne faite abomination (ou l'inverse) et 800m plus haut vous vous trouvez au paradis. C'est long 800m quand vous vous hissez sur une neige sale, trafolée par des milliers de skieurs, et regelée. Mais vous savez que ce n'est qu'un mauvais moment à passer. Alors vous fermez des yeux, que vous auriez mieux fait de ne pas ouvrir sur tout ce qui traîne, réduit en charpie, je vous fait grâce de l'énumération de tout ce qui a été abandonné, perdu, jeté là, principalement des plastiques qui vont se retrouver dans la «bonne eau des montagnes ».
Puis, le ciel rosit, vous voudriez prendre une photo mais il y a toujours un artéfact hideux pour vous gâcher le paysage. Alors, frustré vous renoncez.
J1 – 14/5 - Pte Rénod E (3366m) 2.3 - D+ 1410m – 19,3km
itinéraire : Val Thorens – Col de Thorens au niveau du Chalet de Chavière 3120m– bas de la cuvette du Glacier de Chavière à 2900m – col entre les Ptes Rénod W et E (en A/R)
Après avoir quitté les terres hostiles de la Station et basculé en E, vous entrez dans la vastitude de régions noyées de lumière. Si vous êtes davantage habitué à la moyenne montagne qu'au pays des glaces (même résiduelles), un jour comme celui-ci vous pourrez vous croire en haute mer, une mer d'huile, troublée par nul vent, nulle brise, rien. Vous aurez alors l'impression d'avoir à ramer jusqu'à atteindre un horizon bien lointain, toujours reculant, et ceci, bien sûr, sous une chaleur écrasante. Mais, vous finirez bien par accoster et alors il faudra vous employer pour vous hisser jusqu'à ce petit col qui vous nargue longuement sous un ciel de bleuet. Là, il convient de déposer ses skis pour grimper le long de la crête, de louvoyer entre les rochers tantôt en accrochant ses crampons sur la neige dure, tantôt en les extirpant des trous dans lesquels ils ont eu la mauvaise idée de se coincer.
Mais là-haut, malgré tous ces efforts et tous les nuages qui boursouflent du côté des Cerces, vous êtes au comble du bonheur. Comprenne qui pourra.
Les 300m de pente sont vite avalés et avec un plaisir indicible. Hélas, chaleur et platitude ne font pas bon ménage et maintenant votre barque est dans un marais spongieux et une fois arrivé dans le creux, il va falloir la tirer jusqu'au Chalet de Chavière (situation idyllique mais quelques travaux à prévoir). Ce qui nous amène à cette conclusion hautement philosophique : c'est dur quand c'est mou (mauvais esprits, merci de vous abstenir de commentaires).
Intermède : Premier WE de camping sauvage, le bonheur des bonheurs ; pour ne pas perturber la quiétude de la campagne tarine, nous ne dirons pas où nous avons planté la tente. Quant à notre propre quiétude, autant dire que la faune locale ne l'a pas trop respectée. Soirée agrémentée par les clarines des tarines, le braiment de l'âne, les soupirs des vaches d'Herens, les aboiements des patous et les lointaines cloches de la chapelle. Ce fut aussi une nuit de pleine lune avec le sifflement d'attaque des oiseaux de proie. Mais nous étions sous la zone d'influence de N.D. de la Vie et seul, pour certain, un sommeil peuplé de rêves étranges a échappé à la vigilance de cette Dame.
J2 – 15/5 – Mont de Gébroulaz (3509m) 2.3 – D+ 1210m- 15,5km
Itinéraire : Val Thorens – Col de Thorens – Col de Gébroulaz – Mont de Gébroulaz en A/R
Bon, jusqu'au col de Thorens, j'ai tout dit sauf que là, on sort directement au col par un cheminement de jour en jour plus famélique, la neige se faisant avaler par le soleil vitesse grand V. A skis ça ne passe plus ni à la montée ni à la descente : cailloux, glace, bédière. C'est fort joli mais pas bien pratique. Si vous êtes monté par là, à moins d'être particulièrement étourdi, vous ne tenterez pas de descendre par le même chemin. Il vous faudra faire un petit crochet direction S puis W pour repasser devant la maison de vos rêves et ensuite basculer sur la piste qui vous ramènera à la station.
La montée au Col de Gébroulaz est de toute beauté, la vue large, ouverte sur tout le glacier de Chavière. Il vous faudra surmonter 2 ressauts, l'un aimable, l'autre plus court mais un peu plus coriace. Selon l'échelle de cotation élaborée sur site, la veille même, par un dénommé Trane «pas de couteaux pour les plus hardis, les couteaux pour les autres et les crampons pour les peureux», nous avons pris acte du fait que nous étions à classer dans la 2e catégorie.
Au Col, deux bonnes nouvelles : les nuages avaient l'air de se tenir à une distance encore respectueuse et le sommet pouvait s'atteindre sans problème particulier à skis. Là-haut le public était nombreux et affable. Le timing fut excellent pour le haut et le ressaut sous le col mais déjà un peu limite dans le bas du second ressaut. Mais on ne va pas faire les difficiles. Quelques gouttes de pluie au moment de démarrer, ou plutôt de fuir de Val Thorens.
En deux jours, nous avons côtoyé la beauté sublime, là où l'homme n'est pas intervenu, et vu ce qu'il est capable de laisser sans scrupules après son passage.
Cette 2e fournée de vanoiseries - merci à Jacques d'avoir partagé celle-ci avec moi - nous a comblés en ces temps où trouver une sortie qui vaille un (coûteux) déplacement n'est pas chose facile...mais possible.