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Sorties > Vercors > Retour d'expérience au couloir des Sultanes

Retour d'expérience au couloir des Sultanes ⭐⭐⭐

Massif : Vercors
Départ : Prélenfrey (990 m)

Topo associé : Pas de l'Oeille, Couloir des Sultanes

Sommet associé : Pas de l'Oeille (1960 m)

Orientation : E

Dénivelé : 970 m.
Ski : 4.1

Sortie du mardi 13 avril 2021

JanLeYeti

Conditions nivologiques, accès & météo

Météo/températures : Frais au départ (-5°C). Vent de Nord sensible
Conditions d'accès/altitude du parking : Parking d'été (1310m)
Altitude de chaussage/déchaussage :Parking à la montée. Pour la descente, voir le Cr
Conditions pour le ski : Semblant bonnes lors de l'ascension
Activité avalancheuse : Voir Cr

Activité avalancheuse signalée dans la zone ce jour, voir la carte.

Skiabilité : 🤢 Mauvaise

Compte rendu

Bonjour.
Vous trouverez ci après un petit retour d’expérience suite à un accident d’avalanche survenu il y a 10 jours.
Je vais tâcher d’être factuel, et d’apporter ma modeste contribution au processus de prise de décision. Si ce récit peut servir à d’autres, ce sera la seule fierté que je tirerai de cette expérience.

Mardi 13 avril.
Grand beau sur l’Alpe, température fraîche pour la saison (-5°C à 1500m), vent du nord sensible.
Il a neigé la veille (environ 15cm à 1650m dans le secteur concerné – face Est du Vercors) et le vent a été présent pendant les précipitations.
Habitant au pied de cette barrière Est, je parcours très régulièrement ses pentes. Je pratique assidûment le ski de randonnée depuis 35 ans.

Fin mars, nous avons réalisé l’itinéraire du M des Sultanes avec un collègue de Prélenfrey, en excellente neige de printemps, avec seulement 5mn de portage.

Ayant bien observé l’évolution de la fonte, je sais que je vais pouvoir faire les Sultanes, mi avril, en poudre, avec seulement 5-10mn de portage à la descente. Cela ne se produit pas tous les ans.
Départ 6h20 du parking supérieur (1310m). Le vent est bien sensible, mais je me dis que dans le couloir, je serai abrité.
Montée skis aux pieds légèrement au nord de l’itinéraire classique, pour passer dans des clairières, passage au niveau de la balise Nivose, et accès au pied du couloir.
Il est 7h30. Lever de soleil magique, les falaises et pentes passent au rose, orange. Je ne suis pas euphorique, mais juste ravi de pouvoir être là, de profiter de ce moment.

La neige est cartonnée : 5 à 10cm de neige dense à grain fin type plaque (enfoncement du doigt facile), sur 10 à 20cm de neige sans cohésion, le tout posé sur de la neige de névé très dure.
Je remonte le cône, à l’abri du vent, avec justes quelques arrivées de neige du haut du couloir par moment. Les accumulations sont présentes par endroits, sans être énormes.
Je peste contre cette trace pénible à faire, avec le ski qui passe à travers la plaque, et s’enfonce dans la neige sans cohésion.

Arrivé au pied de l’étroiture, j’essaye de deviner comment peut être le manteau au dessus de moi. Je réfléchis entre chaque conversion, en me disant que quand même, ce n’est pas « super sain ».
Je poursuis, en me rappelant le nombre de fois où je suis venu ici, et où les doutes s’étaient envolés dès l’étroiture passée. La neige descendue des rochers et pentes latérales s’accumule ici, et 30m plus haut, la situation nivologique devenait plus saine (selon nos (ou mon) jugements),

En haut de l’étroiture, en rive gauche, je me pose deux minutes. Je me dis qu’il me reste deux conversions à faire, et j’aurai passé le plus raide. J’y verrai plus clair.

Au moment où je reprends appui sur mon seul ski aval pour faire la conversion, la plaque se fissure à mon niveau, sur environ 5m de large.
Je suis immédiatement embarqué, et toute la neige posée sur le fond dur prend la direction de la vallée.
L’expression de lessiveuse est bien adaptée si je veux décrire le lieu où je me trouve. Je m’envole sur un gros rocher proéminent dans le cône d’accès, et poursuis mes roulés-boulés sur environ 250 mètres de distance dans la clairière au pied du couloir, et m’arrête peu avant les premiers arbres.

Je réussis à cracher la neige que j’ai inhalée, et retrouve une respiration normale. Je cherche une plaie d’où pourrait sortir beaucoup de sang, une fracture éventuelle.
J’ai mal au bassin et ne peux me servir de ma jambe gauche. Je tremble car je suis trempé et en plein vent.
Par chance, un de mes skis n’a pas déchaussé, et j’ai gardé un bâton. Je prends mon ski en main, et me mets à glisser vers l’aval, 50cm par 50cm. Je me concentre sur ce que j’ai à faire. Je connais le terrain par coeur, sais où aller, où je suis.

Je rejoins la piste inférieure où il n’y a plus de neige. Je réussis à me mettre debout, et à avancer en marche arrière, en prenant appui sur mon bâton et mon ski, en traînant ma jambe gauche.
J’ai mal mais cela reste supportable. Je me concentre sur ma respiration, sur mes tremblements, et ne m’autorise que de rares pauses.
Quand je bute sur la barrière située juste à côté du parking, je me dis que là, je suis tiré d’affaire.
Il m’a fallu 50 minutes pour descendre.

Je monte dans ma voiture, mets le chauffage au maximum, et descends chez moi (10mn) d’où mon fils appelle les secours.

Au sujet des secours : un grand merci renouvelé aux pompiers de Vif, aux personnels de l’EC145, et toutes les personnes que j’ai cotoyées à Michallon. Professionnalisme, Bienveillance et Gentillesse sont les qualificatifs qui les caractérisent le mieux selon moi.

Bilan médical : fracture du bassin, et de trois vertèbres. Plaies superficielles multiples.

Bilan personnel :

- Je suis parti, comment (assez) souvent, seul, sans téléphone. Pas d’Arva non plus cette fois là car j’ai jugé la dernière chute de neige assez faible.
- Je n’ai pas su prendre en compte les signaux « oranges » détectés dans la pente d’accès au couloir, me basant sur ma pseudo-expérience. La météo superbe, le lever de soleil, la beauté des lieux ont sur ce point contribué à ma mauvaise décision.
- Je me suis aussi laissé influencer par ma connaissance parfaite du terrain, de sa configuration hivernale aussi bien qu’estivale, et le fait que je dois parcourir ce secteur plus de 10 fois par saison.


Commentaires

L
luj, le 22.04.21 16:00

Merci pour ce retour d'expérience, et bon rétablissement à toi !

J
jpc, le 22.04.21 16:11

Merci à toi, cela n'a pas dû être facile "d'avouer" toutes ces erreurs pourtant fréquentes de skieurs aguerris :-(
En tout cas, cela m'aide à supporter toutes les fois ou… de plus en plus… je décide de faire demi-tour de bien mauvais gré… là où auparavant j'aurais continué comme toi à l'insu de mon plein gré…

Cette sortie
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